Flâner d'un lieu à un autre, d'une ville à une autre ville, en traversant les rues de Paris et d'ailleurs, à la rencontre des mots. Comme le dit si bien Vitoux : « Si on arrive à bien comprendre un pays et si dans un pays on arrive à bien comprendre une ville, et si dans une ville on arrive à bien comprendre une rue, et dans une rue on comprend la maison, on peut dire le monde entier.»
Il y a des mots...
Il y a des mots qui font vivre
Et ce sont des mots innocents
Le mot chaleur le mot confiance
Amour justice et le mot liberté
Le mot enfant et le mot gentillesse
Et certains noms de fleurs et
certains noms de fruits
Le mot courage et le mot découvrir
Et le mot frère et le mot camarade
Et certains noms de pays de villages
Et certains noms de femmes et d'amis.
Paul Eluard
Le Pont
Symbole de force et d'unité,
Favorisant la solidarité,
Amenant deux entités vers une douce et belle amitié
Interpellant le coeur du bien-aimé...
Réunissant les deux rives,
Permettant la liberté de l'eau vive,
Unissant les chemins,
Visant à ne faire qu'un...
Dégageant un flot d'émotions sans raison,
Libérant la circulation de la passion,
Stimulant l'amour par un grand frisson
Rechargeant nos coeurs à l'unisson...
Bâtissons et traversons ensemble notre pont...
Monique
Nichée sur les coteaux de Passy, la Maison de Balzac est la seule des demeures parisiennes du romancier qui subsiste aujourd’hui. C’est dans le cabinet de travail que Balzac a corrigé, de 1840 à 1847, l’ensemble de La Comédie humaine. Ce n'est pas un hasard si la seule pièce reconstituée est son cabinet de travail. Le contraste entre l'étroitesse des pièces, la petite table avec l'immensité de l'œuvre est saisissant. La chambre, le salon et le cabinet de travail ouvraient de plain-pied sur le jardin. Dans la chambre se trouve la fameuse canne aux turquoises, pierres provenant d'un collier de Mme Hanska, est visible dans une vitrine, le salon est consacré à l'évocation de cette dernière, le cabinet de travail où l'on pénètre par un passage plus étroit, est la pièce la plus émouvante de la maison. Il a conservé l'aspect qu'il avait au temps de Balzac. À son époque, personne n'entrait dans ce lieu d'écriture où il aimait la solitude et travaillait avec acharnement, le plus souvent la nuit. Il se couchait tôt, parfois à dix-huit heures, et mettait le réveil à deux heures du matin. Il s'asseyait à cette petite table qui le suivit dans tous ses déménagements et dont il disait : Elle a vu toutes mes misères, essuyé toutes mes larmes, connu tous mes projets, entendu toutes mes pensées, mon bras l'a presque usée, à force de s'y promener quand j'écris. Dans la vitrine sont réunis la célèbre cafetière qui lui permettait, durant ses longues veilles, de tenir le café au chaud, son encrier-cadenas, son cachet, sa montre, un vase de Bohême. La pièce la plus impressionnante est la salle dédiée à la généalogie des personnages de la Comédie Humaine. Les murs sont recouverts de visages de près de mille personnages référencés et de silhouettes dessinées par Charles Huard, d'après les descriptions de l'auteur. Le musée présente des souvenirs personnels de Balzac, des tableaux, gravures et objets relatifs à ses proches et à ses contemporains, ainsi qu’un grand nombre d’éditions originales, manuscrits et illustrations.
Vous ne savez pas, vous, ce que c’est que de rester toute une journée, la tête dans ses deux mains, à pressurer sa malheureuse cervelle pour trouver un mot. L’idée coule chez vous largement, incessamment, comme un fleuve. Chez moi c’est un mince filet d’eau. Il me faut des grands travaux d’art avant d’obtenir une cascade. Gustave Flaubert à George Sand, 27 novembre 1866.
Gustave Flaubert naît en 1821 à Rouen dans l’appartement de fonction de son père, chirurgien en chef de l’hôpital (que son fils ressuscitera sous les traits du docteur Larivière dans Madame Bovary). Très jeune, il se sent gagné par le pessimisme et la mélancolie. Imprégné de littérature romantique, il prend conscience de sa vocation d'écrivain, et c'est à contre-cœur qu'il poursuit à Paris ses études de droit. Puis s'installe en ermite à Croisset, près de Rouen et se consacre désormais à la littérature, vivant dans un isolement volontaire. Il y écrit l'essentiel de son œuvre, mais dégouté par la sottise bourgeoise dont il a fait la caricature dans un ouvrage inachevé, Bouvard et Pécuchet, il meurt épuisé par la fatigue et les soucis en 1880.
La vie me devenait moins facile : quand le corps est triste, le cœur languit. Il me semblait que je désapprenne en partie ce que je n'avais jamais appris et que je savais pourtant si bien, je veux vivre. Albert Camus, La Peste, 1956.
Albert Camus naît en 1913 à Mondovi en Algérie, il ne connaîtra de son père qu'une photographie, et une anecdote significative : son dégoût devant le spectacle d'une exécution capitale. Albert Camus, élevé par sa mère mais surtout par une grand-mère autoritaire, et par un oncle boucher, apprend la misère dans le quartier populaire de Belcourt, à Alger où ils ont émigrés : La misère m'empêcha de croire que tout est bien sous le soleil et dans l'histoire ; le soleil m'apprit que l'histoire n'est pas tout. Sa mère, Catherine Sintès, d'origine espagnole, fait des ménages pour nourrir ses deux fils, Camus éprouve pour elle une affection sans bornes, mais il n'y aura jamais de véritable communication entre l'enfant et cette mère exténuée par le travail, à demi-sourde et presque analphabète. A sa mère qui parlait peu et difficilement, qui ne savait même pas lire, le lie toute sa sensibilité ; on peut penser qu'une partie de l'œuvre s'est édifiée pour tenter d'équilibrer cette absence et ce silence, ou de lui répondre. En 1923, à l'école communale, un instituteur Louis Germain conscient des facultés intellectuelles de l'enfant, le fait travailler bénévolement après les heures de classe, et va convaincre sa famille de présenter le jeune écolier au concours des bourses qui allait lui permettre d'aller au lycée. Reçu, Albert Camus entre au lycée Bugeaud d'Alger en 1924. Camus est écrivain, philosophe, romancier, dramaturge, journaliste, essayiste et nouvelliste français. Il est aussi journaliste militant engagé dans la Résistance française et, proche des courants libertaires, dans les combats moraux de l'après-guerre. Il développe un humanisme fondé sur la prise de conscience de l'absurde de la condition humaine mais aussi sur la révolte comme réponse à l'absurde, révolte qui conduit à l'action et donne un sens au monde et à l'existence, et alors naît la joie étrange qui aide à vivre et mourir. Albert Camus reçoit le prix Nobel en 1957 et meurt en 1960 à Villeblevin dans l'Yonne en France dans un accident de voiture. Une stèle est érigée en sa mémoire face au mont Chenova à Tipaza sur laquelle est gravée une citation de Camus : Je comprends ici ce qu'on appelle gloire le droit d'aimer sans mesure.